Quand j'étais écolier, plusieurs de mes camarades de classe ne pouvait pas comprendre qu'on pût se proposer d'étudier les mathématiques et en conséquence se désintéressaient d'elles. Cependant, ces mêmes camarades considéraient quiconque qui était fort en mathématiques comme digne de leur respect pour tant d'intelligence et d'habileté. Je ne me distinguais aucunement dans ce domaine, en tant qu'écolier, et, bien que j'eusse quelque aptitude au calcul mental, on ne pouvait guère deviner que les mathématiques deviendront un jour pour moi une occupation professionnelle. Un jour, notre maître nous fit subir une épreuve comportant un problème de géométrie, et je vis que si je menais d'un certain point une perpendiculaire à une certaine ligne tout devenait évident. Aucun de mes camarades de classe ne vit cela, en sorte que l'épreuve ne fut pas notée. j'avais en fait prouvé à tous que le problème était un problème facile dont la simplicité devenait manifeste grâce à une vision plutôt qu'à une mémorisation ils refusent d'admettre que la vision est aussi facile, ou même plus facile, que la mémorisation.
Pour moi - qui était alors âgé de 13 ans - ce fût un tournant dans ma vie. Je compris que les mathématiques étaient une chose de l'esprit, résultant du mouvement intérieur de l'imagination associé à des expériences qui deviennent graduellement de plus en plus profondes. Les professeurs et les livres facilitent la rencontre des problèmes. Les plus significatifs et les plus intéressants mais, en fait, les mathématiques sont autour de nous et à la portée de chacun de nous pourvu que nous développions le genre de sensibilité correspondant à ces problèmes. En vérité c'est bien une affaire de sensibilité que de raisonnement ( bien que la raison soit une sorte de " super - sensibilité" appliquée aux idées et aux pensées) et j'ai depuis lors décelé chez chacun de nous cette aptitude à percevoir la beauté des mathématiques.
Considérer une goutte d'eau tombant au centre d'un sceau rempli d'eau; elle crée une ride circulaire dont le rayon grandit jusqu'à ce qu'elle atteigne la paroi du sceau. Si on laisse tomber des gouttes d'eau l'une après l'autre, une succession de cercles concentriques apparaît qui forment un dessin si fascinant qu'on ne peut s'arrêter de contempler. Si l'on fait tomber les gouttes plus prés de la paroi du sceau, le dessin devient beaucoup plus compliqué car, maintenant, le premier cercle formé est réfléchi par la paroi incurvée du sceau et interfère avec le suivant.
L'œil banal prend plaisir à ce jeu des ondes tandis que l'œil mathématique se demande:" Que vois-je exactement, et que verrais-je si je faisais tomber les gouttes de plus en plus prés de la paroi du sceau; qu'arrivera-t-il si je laissais tomber les gouttes individuellement à des cadences variées ou plus d'une goutte à la fois?" En outre, puisque l'œil mathématicien opère à l'intérieur de l'esprit, les expériences ne sont pas réalisées effectivement mais l'imagination est laissée libre d'apporter ses contributions. Cela se fait sur un morceau de papier avec des instruments aussi simples qu'un crayon, une règle et un compas. Il est beaucoup plus simple d'étudier le problème de cette manière, puisque cela exige tellement moins de matériaux que les expériences réelles. Chacun peut essayer la chose par lui-même, mais la fascination éprouvée en observant l'effet de la chute des gouttes, et qui fut la première impression reçue par l'esprit, ne doit pas être oubliée. Quand nous dessinons, nous décrivons partiellement ce que nous avons vu, mais, puisque maintenant nous sommes libres de faire ce que nous voulons avec nos instruments, nous pouvons nous démontrer à nous-même jusqu'à quel point nous pouvons aller en en faisant usage.
Dessiner deux familles de cercles concentriques est une besogne assez simple. Former des couples de cercles selon divers critères peut nous conduire à un autre problème fascinant, car nous pouvons développer une nouvelle vision qui ne découvre pas seulement ce qui est réel mais aussi ce qui potentiel ou virtuel. Par exemple, il n'y avait pas de ligne droite dans notre dessin mais nous pouvons en voir une si seulement nous marquons les points où se coupent les cercles d'égal rayon pris dans chacune des familles. Ces points, en fait, se trouvent sur une ligne droite. Mais qu'arriverait-il si nous devions former des couples avec des cercles dont la somme des rayons serait égale à une longueur choisie, au lieu de cercles de rayons égaux? Par le simple fait de marquer leurs points d'intersection, nous faisons apparaître des ellipses que nous choisissons de longueur différentes. Si, au lieu d'accoupler des cercles dont les rayons ont la même somme, nous accouplons des cercles dont les rayons différent d'une même longueur, nous obtenons des hyperboles, ces courbes majestueuses qui s'en vont à l'infini. Beaucoup d'autres choses encore peuvent jaillir de ces deux familles simples de cercles concentriques.
En vérité la raison pour laquelle nous devrions étudier les mathématiques, c'est qu'elles font en chacun de nous l'éducation d'un troisième œil, d'un œil capable de scruter des relations en soi, capable de découvrir dans les situations les plus ordinaires quelque chose qui vaut la peine d'être noté et qui est susceptible d'une extension indéfinie. Le concept de l'infini a son vrai champ dans le royaume des mathématiques, et les mathématiques sont parmi nous ceux qui l'ont rendu accessible à tous les esprits. Lorsque des relations ont été observées, un grand pas en avant a été fait témoignant à la fois du pouvoir de l'esprit et d'une percée en direction du concept de l'infini. On peut dire, par exemple, que, si une chose est deux fois plus grande qu'une autre, la seconde doit être alors en même temps la moitié de la première. Si une chose peut être doublée, on atteint en même temps la notion du doublement en soi et on voit qu'il est possible de doubler le double du double... de quelque chose et, inversement de prendre la moitié de la moitié.. .de cette chose. Le fait de doubler indéfiniment accroît indéfiniment la grandeur tandis que le fait de diviser indéfiniment par deux la réduit indéfiniment. Nous atteignons en même temps et du même coup l'infiniment grand et l'infiniment petit.
Comme la poésie, la mathématique satisfait en chacun de nous les sensibilités les plus profondes. L'une et l'autre nous maintiennent en contact avec l'éternel mouvant, avec ce qui n'est pas formé tout en l'étant et dont la nature est subtile. Mais les mathématiques naissent des soins et de l'attention d'un esprit réceptif à l'expérience, et nos esprits sont engagés dans toutes sortes d'activités, financières, économiques, pratiques, scientifiques et ainsi de suite. Des relations sont impliquées dans toutes nos activités. A partir du moment ou nous prenons conscience de ces relations, nous pensons mathématiquement. Les mathématiques font partie intégrante de nos vies puisque, en elles, nous nous intéressons particulièrement aux relations. Tous les hommes ont besoin des mathématiques afin de mieux comprendre à quels problèmes ils doivent faire face, et comment ils peuvent mieux agir sur la réalité.
Quand les mathématiques sont réellement comprises comme la manière naturelle d'aborder l'univers de l'expérience en simplifiant les choses, par omission délibérée de tous les attributs qui sont sans rapport avec la question, et en mettant l'action sur les relations entre les choses, on ne peut manquer de voir que c'est dans notre intérêt de développer ce pouvoir d'abstraction et de comparaison, et d'essayer de réaliser notre objectif d'être de la sorte mieux armé.
La valeur des mathématiques ne saurait être exagérée. De même qu'il est impossible de vivre sans respirer, de même on ne peut entrer dans l'univers des relations en soi qu'au moyen des mathématiques parce que cet univers et les mathématiques ne sont qu'une seule et même chose. En refusant d'étudier les mathématiques, nous refusons de nous donner à nous même un pouvoir que cette étude peut développer, et qui nous est nécessaire si nous voulons pénétrer plus profondément, avec plus de sécurité et, en particulier d'une manière plus saine, dans le monde si hautement organisé d'aujourd'hui, et travailler ainsi à un niveau qui se situe à un ou deux étages au-dessus de l'immédiat. Pour que puissions être en état de vivre dans nos communautés modernes, si complexes et diversifiées, et de les servir, il semble indispensable que nous soyons dotés d'une manière de penser capable d'étudier un grand nombre d'entités complexes. Jusqu'à ce jour, personne n'a créé, pour parvenir à cette fin, un système plus adéquat que les mathématiques, comme on peut le voir par les multiples emplois qu'on en fait dans toute les avenues de l'existence.
Bien que les mathématiques puissent paraître difficiles pour les étudiants, il doit être souligné qu'elles ne sont pas seules à posséder ce caractère. Personne ne contestera qu'il faille travailler dur pour acquérir un niveau élevé de maîtrise dans les jeux ou les affaires. Le sport est ouvert à tous, mais tout le monde n'en devient pas un professionnel. Les mathématiques aussi sont à la disposition de tous mais là encore, il n'y a qu'un faible pourcentage qui veuille en faire sa carrière. Les mathématiques donnent tant de plaisir et sont si enrichissantes quand on les comprend bien, qu'on devrait se demander, quand on éprouve de la répulsion à leur égard: "Pourquoi n'ai-je pas subi leur contagion?" plutôt que de supposer qu'elles sont difficiles, ennuyeuses ou inutiles, car elles sont aucune de ces choses.
Pour un enseignement dynamique des mathématiques. Galeb Gategno.
Pour moi - qui était alors âgé de 13 ans - ce fût un tournant dans ma vie. Je compris que les mathématiques étaient une chose de l'esprit, résultant du mouvement intérieur de l'imagination associé à des expériences qui deviennent graduellement de plus en plus profondes. Les professeurs et les livres facilitent la rencontre des problèmes. Les plus significatifs et les plus intéressants mais, en fait, les mathématiques sont autour de nous et à la portée de chacun de nous pourvu que nous développions le genre de sensibilité correspondant à ces problèmes. En vérité c'est bien une affaire de sensibilité que de raisonnement ( bien que la raison soit une sorte de " super - sensibilité" appliquée aux idées et aux pensées) et j'ai depuis lors décelé chez chacun de nous cette aptitude à percevoir la beauté des mathématiques.
Considérer une goutte d'eau tombant au centre d'un sceau rempli d'eau; elle crée une ride circulaire dont le rayon grandit jusqu'à ce qu'elle atteigne la paroi du sceau. Si on laisse tomber des gouttes d'eau l'une après l'autre, une succession de cercles concentriques apparaît qui forment un dessin si fascinant qu'on ne peut s'arrêter de contempler. Si l'on fait tomber les gouttes plus prés de la paroi du sceau, le dessin devient beaucoup plus compliqué car, maintenant, le premier cercle formé est réfléchi par la paroi incurvée du sceau et interfère avec le suivant.
L'œil banal prend plaisir à ce jeu des ondes tandis que l'œil mathématique se demande:" Que vois-je exactement, et que verrais-je si je faisais tomber les gouttes de plus en plus prés de la paroi du sceau; qu'arrivera-t-il si je laissais tomber les gouttes individuellement à des cadences variées ou plus d'une goutte à la fois?" En outre, puisque l'œil mathématicien opère à l'intérieur de l'esprit, les expériences ne sont pas réalisées effectivement mais l'imagination est laissée libre d'apporter ses contributions. Cela se fait sur un morceau de papier avec des instruments aussi simples qu'un crayon, une règle et un compas. Il est beaucoup plus simple d'étudier le problème de cette manière, puisque cela exige tellement moins de matériaux que les expériences réelles. Chacun peut essayer la chose par lui-même, mais la fascination éprouvée en observant l'effet de la chute des gouttes, et qui fut la première impression reçue par l'esprit, ne doit pas être oubliée. Quand nous dessinons, nous décrivons partiellement ce que nous avons vu, mais, puisque maintenant nous sommes libres de faire ce que nous voulons avec nos instruments, nous pouvons nous démontrer à nous-même jusqu'à quel point nous pouvons aller en en faisant usage.
Dessiner deux familles de cercles concentriques est une besogne assez simple. Former des couples de cercles selon divers critères peut nous conduire à un autre problème fascinant, car nous pouvons développer une nouvelle vision qui ne découvre pas seulement ce qui est réel mais aussi ce qui potentiel ou virtuel. Par exemple, il n'y avait pas de ligne droite dans notre dessin mais nous pouvons en voir une si seulement nous marquons les points où se coupent les cercles d'égal rayon pris dans chacune des familles. Ces points, en fait, se trouvent sur une ligne droite. Mais qu'arriverait-il si nous devions former des couples avec des cercles dont la somme des rayons serait égale à une longueur choisie, au lieu de cercles de rayons égaux? Par le simple fait de marquer leurs points d'intersection, nous faisons apparaître des ellipses que nous choisissons de longueur différentes. Si, au lieu d'accoupler des cercles dont les rayons ont la même somme, nous accouplons des cercles dont les rayons différent d'une même longueur, nous obtenons des hyperboles, ces courbes majestueuses qui s'en vont à l'infini. Beaucoup d'autres choses encore peuvent jaillir de ces deux familles simples de cercles concentriques.
En vérité la raison pour laquelle nous devrions étudier les mathématiques, c'est qu'elles font en chacun de nous l'éducation d'un troisième œil, d'un œil capable de scruter des relations en soi, capable de découvrir dans les situations les plus ordinaires quelque chose qui vaut la peine d'être noté et qui est susceptible d'une extension indéfinie. Le concept de l'infini a son vrai champ dans le royaume des mathématiques, et les mathématiques sont parmi nous ceux qui l'ont rendu accessible à tous les esprits. Lorsque des relations ont été observées, un grand pas en avant a été fait témoignant à la fois du pouvoir de l'esprit et d'une percée en direction du concept de l'infini. On peut dire, par exemple, que, si une chose est deux fois plus grande qu'une autre, la seconde doit être alors en même temps la moitié de la première. Si une chose peut être doublée, on atteint en même temps la notion du doublement en soi et on voit qu'il est possible de doubler le double du double... de quelque chose et, inversement de prendre la moitié de la moitié.. .de cette chose. Le fait de doubler indéfiniment accroît indéfiniment la grandeur tandis que le fait de diviser indéfiniment par deux la réduit indéfiniment. Nous atteignons en même temps et du même coup l'infiniment grand et l'infiniment petit.
Comme la poésie, la mathématique satisfait en chacun de nous les sensibilités les plus profondes. L'une et l'autre nous maintiennent en contact avec l'éternel mouvant, avec ce qui n'est pas formé tout en l'étant et dont la nature est subtile. Mais les mathématiques naissent des soins et de l'attention d'un esprit réceptif à l'expérience, et nos esprits sont engagés dans toutes sortes d'activités, financières, économiques, pratiques, scientifiques et ainsi de suite. Des relations sont impliquées dans toutes nos activités. A partir du moment ou nous prenons conscience de ces relations, nous pensons mathématiquement. Les mathématiques font partie intégrante de nos vies puisque, en elles, nous nous intéressons particulièrement aux relations. Tous les hommes ont besoin des mathématiques afin de mieux comprendre à quels problèmes ils doivent faire face, et comment ils peuvent mieux agir sur la réalité.
Quand les mathématiques sont réellement comprises comme la manière naturelle d'aborder l'univers de l'expérience en simplifiant les choses, par omission délibérée de tous les attributs qui sont sans rapport avec la question, et en mettant l'action sur les relations entre les choses, on ne peut manquer de voir que c'est dans notre intérêt de développer ce pouvoir d'abstraction et de comparaison, et d'essayer de réaliser notre objectif d'être de la sorte mieux armé.
La valeur des mathématiques ne saurait être exagérée. De même qu'il est impossible de vivre sans respirer, de même on ne peut entrer dans l'univers des relations en soi qu'au moyen des mathématiques parce que cet univers et les mathématiques ne sont qu'une seule et même chose. En refusant d'étudier les mathématiques, nous refusons de nous donner à nous même un pouvoir que cette étude peut développer, et qui nous est nécessaire si nous voulons pénétrer plus profondément, avec plus de sécurité et, en particulier d'une manière plus saine, dans le monde si hautement organisé d'aujourd'hui, et travailler ainsi à un niveau qui se situe à un ou deux étages au-dessus de l'immédiat. Pour que puissions être en état de vivre dans nos communautés modernes, si complexes et diversifiées, et de les servir, il semble indispensable que nous soyons dotés d'une manière de penser capable d'étudier un grand nombre d'entités complexes. Jusqu'à ce jour, personne n'a créé, pour parvenir à cette fin, un système plus adéquat que les mathématiques, comme on peut le voir par les multiples emplois qu'on en fait dans toute les avenues de l'existence.
Bien que les mathématiques puissent paraître difficiles pour les étudiants, il doit être souligné qu'elles ne sont pas seules à posséder ce caractère. Personne ne contestera qu'il faille travailler dur pour acquérir un niveau élevé de maîtrise dans les jeux ou les affaires. Le sport est ouvert à tous, mais tout le monde n'en devient pas un professionnel. Les mathématiques aussi sont à la disposition de tous mais là encore, il n'y a qu'un faible pourcentage qui veuille en faire sa carrière. Les mathématiques donnent tant de plaisir et sont si enrichissantes quand on les comprend bien, qu'on devrait se demander, quand on éprouve de la répulsion à leur égard: "Pourquoi n'ai-je pas subi leur contagion?" plutôt que de supposer qu'elles sont difficiles, ennuyeuses ou inutiles, car elles sont aucune de ces choses.
Pour un enseignement dynamique des mathématiques. Galeb Gategno.
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